Je me suis récemment rendue au Rwanda pour une dizaine de jours dans le cadre de mon travail. J’ai profité de ce voyage pour réaliser un de mes rêves : observer des gorilles dans leur milieu naturel !
Où peut-on voir des gorilles en Afrique ?
Déjà, quand on parle de gorilles, il faut savoir qu’il existe 2 grandes espèces, comportant chacune 2 sous-espèces:
Le Western Gorilla (Gorilla Gorilla) avec pour sous-espèces:
– Western Lowland Gorilla (Gorilla Gorilla Gorilla).
– Cross River gorilla (Gorilla gorilla Diehli).
Et l’Eastern gorilla (Gorilla Beringei) avec pour sous-espèces:
– Mountain gorilla (Gorilla beringei beringei).
– Eastern Lowland gorilla. (Gorilla Beringei graueri).
Les gorilles que j’ai pu observer étaient des Gorilles des montagnes (Gorilla beringei beringei), sans doute la sous-espèce la plus connue de par l’œuvre de Dian Fossey. Les gorilles des montagnes se rencontrent en deux petites populations isolées. Un premier groupe vit dans le parc national de la forêt impénétrable de Bwindi, en Ouganda. Le deuxième groupe vit dans le massif des Virungas une chaîne volcanique qui marque la frontière entre le Rwanda, l’Ouganda et la République Démocratique du Congo – c’est là que j’ai pu observer les gorilles, côté Rwanda.
Trekking dans le Parc National des Volcans
Tôt le matin, accompagnée de 4 de mes collègues, je me rends à l’entrée du Parc National des Volcans. Nous y rencontrons Fernando, qui sera notre guide pour la journée. Il nous donne le choix entre un parcours court, moyen ou long : nous choisissons l’option intermédiaire.
Fernando nous donne ensuite des informations sur le groupe de gorilles que nous allons voir. Il y a 10 familles de gorilles dans le parc habitués à la présence humaine. La famille que nous allons voir s’appelle Amahoro – ce qui veut dire sérénité en Kinyarwanda – et vit sur les pentes du Mont Bisoke. La famille est composée de 18 membres, dont 2 dos argentés ou silverbacks (gorilles mâles adultes « alphas »). Le plus jeune membre de la famille est un bébé de 3 mois !
Nous prenons notre 4×4 et partons ensuite en direction du Mont Bisoke. Nous roulons sur une piste cahoteuse jusqu’à un village, puis nous descendons de voiture. Nous commencons le trek en longeant des champs de pyrèthre, petit chrysanthème utilisé pour faire de l’insecticide:
Nous sommes accompagnées de notre guide Fernando, et d’un garde armé. Il est là pour nous protéger des buffles, qui peuvent être dangereux:
Notre guide nous fait un briefing de sécurité où nous apprenons comment nous comporter en face des gorilles, et en particulier face à un silverback montrant des signes d’agressivité (ne surtout pas s’enfuir, se montrer soumis et éviter le contact visuel), mais aussi avec quels differents grognements nous pouvons tenter de communiquer avec les gorilles. Puis nous entrons dans la forêt. Le sentier est excellent et très agréable, mais il est bordé d’orties géantes, qui piquent même à travers le pantalon (nous allons toutes en garder des engourdissements qui dureront jusqu’en fin de journée).
Après environ une heure de marche, notre guide nous informe que les pisteurs ont repéré la famille Amahoro – ils nous guident jusqu’à eux par radio. Nous laissons alors nos sacs, nos bâtons de marche et toutes nos affaires, et nous nous apprêtons à rencontrer les gorilles…
1 heure avec les gorilles
La rencontre avec les gorilles a été l’un des moments les plus émouvants et mémorables de ma vie.
Nous avançons dans la forêt quand soudain j’aperçois, à quelques mètres devant moi, un immense gorille, assis calmement juste au bord du chemin. C’est dur de décrire ce que j’ai ressenti: émerveillement complet, pur, comme on en ressent rarement dans une vie d’adulte. Je plonge mon regard dans ses yeux bruns – c’est un peu bête a dire mais j’ai soudainement été émue aux larmes.
Un peu plus loin, nous trouvons deux femelles:
Nous continuons à avancer, jusqu’à tomber presque nez à nez avec le deuxième silverback. Il est agité par notre présence: il se met soudainement sur ses pattes arrières et se frappe le torse de ses poings en hurlant. La première réaction de notre groupe est de tenter de fuir, ce que notre guide nous avait pourtant très explicitement demandé de ne pas faire… apparemment notre cerveau reptilien s’était mis aux commandes. Notre guide nous calme (il a visiblement l’habitude des touristes idiots) et « communique » par grognements avec le gorille, ce qui m’impression beaucoup. Celui-ci a l’air rassuré sur le fait que nous sommes complètement inoffensifs, et tout le monde se détend.
Les adolescents du groupe jouent en se balancant de liane en liane, ils tombent, se relevent et recommencent… c’est un rare plaisir de les observer.
Et puis nous voyons le dernier-né de la famille, une improbable boule de poils hirsute…
Nous passons une heure avec les gorilles, et ça passe à toute allure…
Gorilles dans la brume
C’est ici même au Rwanda, sur les flancs des Virungas, que la célèbre primatologue américaine Diane Fossey s’est installée en 1976 et passa plusieurs années à étudier et protéger les gorilles de montagne. C’est aussi là que fut tourné, quelques années après sa mort brutale, le film biographique « Gorillas in the mist » (avec Sigourney Weaver). Fossey a été la première à révéler le caractère pacifique et sociable des gorilles. Avec le Bonobo et le chimpanzé, ce sont les êtres vivants les plus proches de l’homme : leur ADN est à 98 % identique au notre.
Depuis, le Rwanda est devenu tristement synonyme de génocide, après avoir plongé dans l’horreur en avril 1994. Le pays est parvenu petit à petit à retrouver la paix et la stabilité, et est maintenant une destination d’écotourisme exemplaire.
Combien ca coute un permis pour voir les gorilles ?
En Ouganda, les permis pour voir les gorilles coutent actuellement 600 dollars. Au Rwanda, Il faut compter la bagatelle de 1,500 dollars par personne. Le prix a doublé récemment pour passer de 750 dollars à 1,500 dollars, en lien avec la stratégie du gouvernement rwandais de développer un tourisme haut de gamme.
Le prix très élevé permet de limiter les effets négatifs d’un tourisme trop massif, et de reverser des fonds pour la conservation des espèces et les projets de développement des communautés locales. Les revenus versés aux communautés adjacentes au parc sont ainsi passés de 5% du prix des permis à 10%. Grace aux revenus du tourisme les 12 dernières années, plus de 400 projets de développement ont été implémentés: construction d’hôpitaux, d’écoles, infrastructures publiques, etc.
Dans les annees 1970, quand Diane Fossey s’installe au Rwanda, l’espèce était au bord de l’extinction : la population estimée des Virungas était de 240 gorilles. Les derniers recensements effectués en 2011 estimaient la population des gorilles de montagne à 880 : 400 dans la forêt de Bwindi et 480 dans les Virungas. La population des gorilles de montagnes des Virungas a augmenté de 26.3% sur les 7 dernières années. Un nouveau census a commencé en 2015 dont les résultats devraient bientôt être connus.
3 Comments
Sensationnel ! Merci !
C’est vrai qu’on ne doit pas faire le malin quand un silverback commence à s’énerver ^^
Très belles photos en tout cas. C’est nettement plus beau de les voir dans leur habitat que dans une cage, même très bien aménagée.
Entièrement d’accord ! J’avais déjà vu des gorilles en captivité, mais l’expérience est différente du tout au tout….