En février dernier, nous avons quitté New-York pour un long week-end à Cuba. Evidemment un séjour de 4 jours pour cette île c’est bien trop court ! Mais 1) nos jours de vacances sont malheureusement limités aux USA 2) Il est aujourd’hui possible de se rendre à Cuba depuis New-York en vol direct (pour un prix assez modique par rapport au coût moyen des vols dans la région), mais est-ce que cette possibilité durera ? On a donc choisi de faire ce voyage, en se concentrant sur la découverte de la Havane. Et on a trouvé que 4 jours c’est plutôt une bonne durée pour visiter la ville !
Que voir à la Havane en quelques jours?
Havana Vieja
A Cuba, il est possible de se loger chez l’habitant: c’est ce qu’on appelle les « Casas particulares ». C’est une forme d’hébergement populaire et économique: pour la majorité d’entre elles, le prix varie entre 20 et 35 CUC par chambre et par nuit (le CUC, ou pesos convertible, a un taux de change équivalent au dollar american). C’est une forme de commerce privé qui fournit un revenu supplémentaire aux foyers cubains, mais qui profite au final beaucoup plus à l’État.
Nous avons pris une chambre dans une Casa particular dans le vieux centre de la Havane. Le balcon de notre chambre donnait sur le Capitole:
La vieille ville est le quartier le plus touristique de la Havane. Il est entièrement inscrit au Patrimoine de l’Humanité par l’Unesco.
A la différence de la plupart des villes latines où il n’y a qu’une seule place centrale et où l’on trouve les bâtiments les plus importants de la ville, à la Havane, la vieille ville s’est construite autour de quatre places: la Plaza de Armas, la Plaza Vieja, la Plaza de San Francisco de Asis et la Plaza de la Catedral.
Au 16ème siècle, la vieille Havane a été détruite et brûlée par le corsaire français Jacques de Sores. À la suite de cela, les espagnols entreprirent la construction de forteresses et d’enceintes pour protéger la ville, comme le Castillo de la Real Fuerza:
Ces dernières années, l’état cubain a mené d’énormes efforts pour préserver et restaurer la Vieille Havane, grâce à l’Office historique de la Ville. Les zones autour des veilles places du centre ont été superbement restaurées:
Ces zones restaurées contrastent pas mal avec l’état du reste de la ville:
Il y a plusieurs grandes promenades dans le vieux centre, comme le Paseo de Marti:
C’est aussi dans Havana Vieja qu’on trouve les bars les plus touristiques et les plus chers de la ville, comme la Boeguita del medio, connue pour être le QG d’Hemingway lorsqu’il vivait à Cuba. Aujourd’hui c’est un attrape-touriste:
Cuba est bien sur célèbre pour ses veilles voitures américaines, et on a pu en voir un peu partout dans la Havane. Ca a vraiment un charme fou, ces voitures toutes rutilantes et colorées:
A cause de l’embargo américain, les cubains n’ont pas pu importer de voitures ou de pièces pendant plus de cinq décennies. Les voitures cubaines typiques étaient donc jusqu’à récemment les véhicules mythiques de l’Amérique des années 50 (Chevrolet, Pontiac, Buick,…) . Depuis peu, les interdictions sur l’import/export ont été levées, et un grand nombre de véhicules sans grand intérêt de grandes marques européennes ou chinoises sont arrivés sur le marché cubain. Le nombre de voitures de collection dans les rues de Cuba est également en chute libre, car beaucoup de cubains ont vendus leurs vieilles voitures aux collectionneurs étrangers.
Il en reste tout de même un nombre conséquent dans les rues, et les plus belles ont été reconverties en taxis:
Parmi les bâtiments incontournables de la ville, on ne peut pas rater le Capitole National, avec son imposant dôme qu’on voit d’un peu partout (il ressemble beaucoup au célèbre Capitole de Washington). C’est le siège de l’Académie des sciences.
Nous sommes allés boire un verre sur le rooftop de l’hotel Saratoga, qui offre un superbe point de vue sur le Capitole et l’ensemble de la ville:
Nous avons visité le Grand Théâtre de La Havane, siège du Ballet nacional de Cuba, inauguré en 1838. Nous avons aussi tenté de prendre des places pour un ballet, mais sans succès:
Parmi les bonnes adresses de la Havana, on a adoré le restaurant Ivan chef gusto (qui m’avait d’ailleurs été recommandé par une collègue cubaine). De façon générale l’île n’est pas réputée pour sa cuisine, ce qu’on peut comprendre avec les difficultés approvisionnement que connaissent encore aujourd’hui les cubains.
Centro Habana
Le centre de la Havane est fascinant, avec ses dizaines de rues à bâtisses bourgeoises délabrées. On ne voit pas une seule publicité, ce qui saute aux yeux quand on vient d’un pays comme les Etats-Unis. La ville déborde d’agitation et en même temps semble complètement figée dans le temps.
Ces beaux bâtiments classiques ont été construits aux 19ème et 20ème siècles par l’élite cubaine : à l’époque le pays tirait en grande partie sa prospérité de l’industrie de la canne à sucre. Les immeubles ont été laissés à l’abandon, ou très peu entretenus, depuis la révolution cubaine il y a 60 ans. C’est cet état de délabrement étonnant qui fait justement la spécificité de la Havane. Et lui confère un charme vraiment indéniable… C’est un peu ambigu comme sentiment : on se sent forcement très égoïste en tant que visiteur car cette beauté n’est due qu’à la fermeture extrême du régime cubain. Un régime qui malgré la mort de Fidel Castro est toujours implacable. On ne peut que souhaiter une ouverture du pays et un afflux de capitaux, et en même temps on a bien envie que ce charme-là ne disparaisse pas complètement. Très égoïste donc. Alors on profite de la ville, mais avec le désir que les choses s’améliorent enfin pour les cubains.
La Havane a son quartier Chinois, le Barrio chino:
Cuba a connu plusieurs vagues d’immigration chinoise. Dans les années 1800, près de 150 000 d’entre eux sont venus dans l’île, majoritairement pour travailler dans les plantations de canne à sucre. La révolution cubaine de 1959 en a fait fuir une bonne partie et le quartier a ensuite connu un lent déclin. Le quartier chinois de la Havane est donc surtout connu…. pour son absence de Chinois. Effectivement, nous on en a pas vu un seul.
Un passage obligé: Callejon de Hamel, une ruelle couverte d’œuvres murales afro-cubaines, alliant peintures et matériaux bruts, signées par le peintre et sculpteur cubain Salvador Gonzáles Escalona.
Plusieurs centaines de milliers de Cubains pratiquent des cultes afrocubains. Le plus répandu d’entre eux est la Santeria, un mélange de christianisme et de croyances de l’Afrique Occidentale qui s’est développé autour des traditions des Yoruba, un des peuples africains qui était en esclavage à Cuba.
La religion Yoruba est dominée par un Dieu suprême, et des demi-dieux humains, appelés Orishás. Parmi eux, Oggún un dieu guerrier et forgeron qui a comme attribut le fer. Nous sommes tombés dans le Callejon de Hamel sur un autel qui lui était dédié, avec un chaudron et une enclume:
Vedado
Le Vedado se situe à l’est de la rivière Almendares et s’étend jusqu’au quartier de Centro Habana. C’est le quartier le plus commercial de la ville.
La Place de la revolution
C’est l’une des places publiques les plus grandes du monde, avec 72,000 mètres carrés. Elle a été la scène des événements principaux de la Révolution et a accueilli dans le passé jusqu’à un million de personnes. Elle est bordée sur son côté ouest par le ministère de l’Intérieur, sur lequel on trouve le fameux portrait du Che:
Et aussi le portrait de Camille Cienfuegos:
Au sud, le mémorial José Martí, héros national et martyr de la lutte pour l’indépendance:
Tribune anti- impérialiste José Martí
Cette installation est située directement en face de l’ambassade des Etats-Unis et résume bien l’histoire des relations des deux pays: les USA se servaient de ce bâtiment lorsque les relations diplomatiques ont été rompues pour afficher des messages à destination du peuple cubain. En réponse à ces « attaques », Fidel a décidé la création de cette tribune anti-impérialiste, avec des dizaines de drapeaux symbolisant la résistance à l’impérialisme mais qui surtout bloquent totalement la vue. C’est à cette tribune que Fidel Castro a tenu nombre de ses fameux discours fleuves.
L’Ambassade des USA, qui a réouvert en 2015 après plus de 54 ans de fermeture:
La vue est depuis un super petit resto/café: la Fluta Magica.
Necrópolis de Cristóbal Colón
Classé monument national de Cuba, ce cimetière de 56 hectares est l’un des grands cimetières historiques du monde. Il renferme un grand nombre d’œuvres architecturales et sculpturales (mausolées, tombeaux de toutes formes et de tous styles). Un peu l’équivalent cubain de notre père Lachaise,
Le Malecon
Le Malecon, c’est la promenade en bord de mer qui longe la baie de La Havane. Il n’y a pas de plage, mais c’est tout de même agréable de s’y balader.
Les forts militaires
Entre le 16ème et le 18ème siècle, la Havane est devenue le plus grand port de la région caraïbes, et le plus grand ensemble de chantiers navals du Nouveau-Monde. Un vaste réseau de fortifications a été construit pour protéger l’ile militairement. On peut encore admirer aujourd’hui à Cuba les forts El Morro et La Cabana, ici depuis le Malecon:
Pour visiter ces forts, il faut traverser la baie de la Havane. Nous y sommes allés en taxi, et on s’est fait un petit plaisir en choisissant une Pontiac décapotable:
Tous les soirs, il y a vers 21h une cérémonie avec un tir de canon. On l’entend dans toute la ville.
Les musées
Il est étonnant de voir un si petit pays (seulement 12 millions d’habitants) avec une culture aussi forte et une histoire ayant marqué le monde. Avant de partir, nous avons regardé sur Netflix un documentaire en 8 épisodes sur l’histoire cubaine : Cuba Libre. On le conseille vivement, ça nous a donné beaucoup de clefs de compréhension sur le pays.
Le musée de la révolution
Pour en apprendre davantage sur ce pan incontournable de l’histoire de Cuba, un Musée de la Révolution a été créé dans l’ancien Palais présidentiel. Il est difficile à manquer, il y a d’énormes chars d’assaut installés sur la pelouse devant le bâtiment (dont un aurait été utilisé par Castro lors de la bataille à la baie des Cochons en 1961).
On y trouve des installations vieillotes:
Et une propagande qui prête un peu à rire…
Beaux arts cubain
On conseille également l’excellent musée des beaux-arts cubains (photos interdites à l’intérieur!).
L’art déco à Cuba
L’éclectisme architectural de la Havane est ahurissant. Tout se cotoie: architecture coloniale espagnole, style néo-gothique, baroque, mauresque. On y trouve surtout un ensemble unique d’un de mes styles préférés, l’art déco. Parmi les plus beaux bâtiments, le siège de Bacardi (le fameux rhum cubain), construit entre 1920 et 1930:
La Moderna Poesia, une librairie dans le vieux centre:
Plusieurs cinémas, dont le très beau Teatro America:
Et le Teatro Fausto:
Un des plus bel ensemble art déco est surement l’edifio Lopez-Serrano, un gratte-ciel de 10 étages et 78 appartements achevé en 1932. Le bâtiment a été construit selon le modèle des immeubles New Yorkais de la même période (et notamment l’Empire State Building).
Et puis un peu partout, des bâtiments plus simples:
Un tour en dehors de la Havane à Playa del Este
Nous pensions passer l’intégralité de notre séjour a visiter la Havane, mais nous nous sommes retrouves un peu surpris par l’atmosphere un peu étouffante de la ville. La Havane est très polluée, et les temperature élevées n’arrangent rien. Nous sommes donc partis prendre l’air (et un bain de mer) à la plage de Playa del Este, qui se trouve seulement 30 minutes en bus:
La plage est bordée par plusieurs hôtels très décrépis:
Et voilà, ces quatre jours de visite de la capitale de Cuba étaient bien sur trop courts, mais nous ont permis de sentir le pouls de ce pays à la culture si unique… On reviendra!
Aller à Cuba depuis les USA – comment ça se passe ?
Avec la normalisation des relations américano-cubaines engagée par Barack Obama, les voyages entre les deux pays se rétablissent. Le 16 février 2016, les deux pays ont signé un accord bilatéral autorisant 110 vols quotidiens entre les deux pays. En Juin 2016, le Department of Transport a autorisé 8 compagnies aériennes à offrir des vols directs USA/Cuba: American Airline, Southwest, Spirit, Delta, United, Frontier, Alaska et Jetblue.
En théorie, les citoyens Américains ne peuvent se rendre à Cuba qu’à la condition que leur voyage rentre dans l’une des 12 catégories pour lesquelles le Department of Treasury’s Office of Foreign Assets Control (OFAC) a émis des licences. Parmi elles, le “People-to-people”, une catégorie assez vaguement définie qui a pour but de produire “meaningful interaction between the traveler and individuals in Cuba.” C’est la catégorie que tous les « touristes » choisissent. En théorie encore il faut être en mesure de prouver ces interactions par un emploi du temps détaillé et des activités (par exemple nuit dans une casa particular, cours d’espagnol, etc). Dans les faits je ne connais personne à qui cela ait été demande.
En arrivant à l’aéroport de JFK, il y a une section de l’aéroport dédiée aux voyageurs pour Cuba, avec peu plus de formalités que pour un autre vol. Notre compagnie aérienne nous a demandé de signer un formulaire attestant de la catégorie de l’OFAC dans laquelle se situe notre voyage (comme les citoyens américains doivent le faire) et notre carte d’embarquement a reçu un tampon spécial : une preuve d’assurance maladie est requise pour tous les visiteurs étrangers par le gouvernement cubain, elle est incluse dans le prix des billets d’avions et les voyageurs doivent garder leur carte d’embarquement tamponnée pendant leur séjour comme preuve de cette couverture. Il faut aussi un visa, appelé carte touristique, pour Cuba. Nous on l’avait fait faire au consulat de Cuba a Paris lors d’un précèdent voyage, mais on peut aussi beaucoup plus simplement se la procurer au comptoir lors du check-in (pour 50$).
7 Comments
Magnifique et très intéressant article ! Merci ! Cela a été un pèlerinage et surtout une découverte
Bonjour Carole,
Merci beaucoup pour votre article, très détaillé et intéressant. Nous allons nous nous en inspirer pour notre prochain séjour de 4 jours à la Havane.
J’aimerais vous poser une question sur les vols directs pour la Havane depuis les USA. Nous sommes français mais nous nous rendrons pour quelques jours à la Havane lors de notre séjour en Floride. Je crois comprendre de votre article que nous n’avons aucune demarche à effectuer en France avant notre séjour, tout pouvant se faire à l’aéroport lors du check-in. Si nous partions de Paris par exemple, il faudrait nous procurer une carte touristique auprès de l’ambasade de Cuba à Paris, ainsi qu’une attestation de couverture de notre assurance.
Merci d’avance pour votre retour.
Lili
Bonjour Lili,
Oui tout à fait, il est possible de faire toutes les démarches à l’aéroport lors du check-in. Le prix de la carte touristique diffère selon les compagnies (entre 50$ et 85$), je vous conseille de vérifier toutes les modalités avant le vol sur le site de la compagnie aérienne (d’après ce que j’ai pu lire, avec American Airlines et Frontier l’achat se fait en ligne – mais c’est à vérifier). Même si vous n’avez pas d’assurance voyage complémentaire, une assurance maladie est comprise dans le prix de votre billet d’avion (le billet d’avion fait foi). N’hésitez pas si vous avez d’autres questions! Et bon voyage! 🙂
Bonjour, votre article est très interessant , est ce qu’il serait possible de me donner les coordonnes de votre logement si il vous a vraiment plu? je prevois un trip de 4 jours aussi, et si vous avez des conseils pour ce qui est de la repartition des lieux à voir sur les 4 jours…Merci
Bonjour, notre casa particular était la Casa Ady, voilà l’adresse email pour les contacter: rent@renthavanacuba.com. Nous avons passé une demi-journée à Playa del Este, et une journée à explorer le Vedado. Le reste du temps (2 jours 1/2) nous avons marché entre Havana Vieja et Centro Havana et visité les musées/forts. Bon voyage!
J’ai noté l’adresse pour le restaurant ! On restera deux jours plein à La Havane 🙂 Pour cette durée, tu conseilles le Vedado ?
Ca dépend ou car c’est grand 🙂
Je trouve que c’est un peu loin de la vieille ville qui est vraiment chouette à découvrir, surtout si vous n’y restez que deux jours.